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Inégalité de droit, voilà au moins une inégalité de dignité; inégalité de considération; inégalité de cette jouissance qui dépend de l'estime et de l'amour d'autrui ; et n'est-elle (sic) rien que cette jouissance?

Il s'ensuit qu'aucun plan renfermant inégalité ne seroit admissible qu'autant que le plan de l'égalité parfaite se trouvât présenter des dangers solides et articulés dont le plan d'inégalité se trouvât libre.

Les réponses de Bentham aux questions posées par la monarchie française ne sauraient toutes nous intéresser. Peu nous importe par exemple, les solutions qu'il suggère aux problèmes que soulève la représentation du clergé et de la noblesse. Signalons une affirmation catégorique du principe de l'identité naturelle des intérêts. Demandant que l'on impose « à chaque membre serment de préférer l'intérêt général à l'intérêt particulier », il a soin d'ajouter que l'utilité de ce serment,

ce n'est pas d'empêcher l'intérêt particulier de l'emporter dans l'assemblée sur l'intérêt général. Cet intérêt n'est autre chose que le composé de tous les intérêts particuliers: ainsi plus les intérêts particuliers sont libres de se développer, plus la décision se trouvera d'accord avec l'intérêt général.

Sous le titre « Représentation. Secours à tirer de la pratique des autres pays de constitution représentative, et nommément de l'Angleterre », il écrit:

Sur ce sujet comme sur tous les autres la pratique d'un pays quelconque peut être bien instructive, pourvu qu'en s'en servant on la juge. Il en est des exemples en législation comme du feu et de l'eau. Bon valet, mauvais maître.

Puis, comparant la France et l'Amérique :

La différence entre la constitution démocratique dans l'un des cas et monarchique de l'autre n'empêche guère que les exemples que fournissent ces républiques illustres ne soient applicables à la France. La constitution que le père du peuple

s'efforce de planter c'est justement la plus pure des démocraties, seulement sous l'ombre d'une monarchie. Donnez aux États Américains, au lieu du Président du Congrès, un Roi, cette Amérique est ce que va devenir la France. Transformez le Roi de la France en Officier tel que le Président du Congrès, la France devient ce qu'est l'Amérique.

Il écrit encore, dans un fragment postérieur (il y est question de la prise de la Bastille. Déjà Bentham se défie de la démocratie française):

Un droit constitutionnel parfait et prêt à l'être s'est déjà établi en Amérique. -La Constitution Angloise est très bonne pour les Anglois et pour les François. La Constitution Américaine seroit encore meilleure en elle-même, mais elle ne leur convient pas.

Et, dans un essai intitulé « Utilité à tirer du droit constitutionnel Anglois »> :

Dans toute partie de la législation vient d'ordre de dignité d'abord la raison, ensuite le préjugé fondé sur l'expérience. Mais la raison n'est à la portée que de peu de monde : le préjugé peut être suivi par tous.

Mais il critique

le galimatias de la représentation virtuelle: phrase au moyen de laquelle on pourroit prouver la constitution marocaine aussi libre que l'Angloise.

Il demande, s'il faut un cens électoral, que la « qualification » soit

aussi petite que l'on voudra: disons vingt livres, dix livres de rente annuelle; elle ne sauroit être trop petite, tandis qu'elle est quelque chose surtout si l'on y ajoute la qualité personnelle de savoir lire. Tandis qu'on a quelque chose de fixe à perdre, il n'est pas de danger que l'on s'imagine de son inté

rêt à s'allier avec ceux qui n'ont rien, pour amener la division égale des propriétés, destruction de toute propriété.

Il demande des circonscriptions électorales égales, sans distinction des villes et des campagnes.

A tant d'électeurs un député.

Il n'admet pas le vote plural; ne veut pas que plusieurs propriétés dans plusieurs provinces donnent le droit de voter plusieurs fois, ni qu'il y ait vote cumulatif, selon le chiffre de la fortune.

Quelles que soient les espèces de propriétés qui doivent former la qualification: choses mobiles, choses immobiles, choses animées, choses inanimées, choses entières, parties de choses, droits partiels sur des choses; ce n'est pas cela dont il s'agit d'assurer le bonheur, ce n'est pas cela qui juge. Si les bœufs et les ânes savoient aussi bien choisir un protecteur qu'en ressentir le besoin, on pourroit et on devroit multiplier les votes par tête de bœuf, par tête d'âne; mais alors c'est aux bœufs et aux ânes mêmes que ces votes devroient s'accorder, et non à leurs maîtres.

Par quelle raison devroit-on accorder au riche plus de votes à cause de sa richesse? C'est justement à cause de cela qu'il faudroit plutôt ne pas lui accorder autant. Plus on a de richesses, plus on a de facilités pour influer sur les votes de ceux qui en ont moins. Ce seroit plutôt au possesseur d'une seule portion qualifiante, être trop mal pourvu en toute façon pour influer sur personne, qu'il faudroit accorder des votes en nombre. S'il faudroit accorder, au propriétaire de deux mille arpens, deux mille votes à cause de ses deux mille arpens, autant vaudroit encore lui donner deux vingtaines ou deux dizaines de votes à cause des deux vingtainés ou deux dizaines de votes d'autrui dont ses deux mille arpens lui accordoient la faculté de disposer comme de la sienne propre.

Dira-t-en, pour servir de raison à cet effet, que celui qui a le plus de propriété a plus d'intérêt à la prospérité et a la conservation de l'état de celui qui a moins? c'est, je crois, ce qu'on

a dit à cet effet, ou quelque chose qui y approche. Mais cette considération, pertinente et valable en d'autres cas, là où, par exemple, il s'agit de choisir quelqu'un pour un emploi important et actif dans l'administration des affaires, n'a ici point d'application. La seule raison pour laquelle, là où il ne s'agit que du droit de contribuer quelques grains (? et deux mots illisibles) dans l'ellection de pareils emplois, ou des nominateurs ou surveillans de pareils emplois, c'est de préserver les propriétaires de se voir dépouillés par les votes des non-propriétaires. Mais ceux-ci tant qu'ils restent tels, j'ai déjà fait voir pourquoi il ne faudroit pas qu'ils eussent aucun vote. Dans ce cas ce ne pourroit être pour les défendre contre les les non-propriétaires que l'on devroit accorder le doublement de leurs avantages déjà inévitablement plutôt trop considérables que trop peu. Ce n'est pas de la part de leurs co-propriétaires, quels (sic) pauvres qu'ils soient, que les riches propriétaires ont à craindre cependant c'est contre ceux-là seuls que c'est (sic) inégalité prétend les défendre. Ce qui est au grand propriétaire son tout, au petit propriétaire est le sien. Alliés naturels l'un de l'autre, ils ont pour seul ennemi naturel le nonpropriétaire.

Il condamne l'élection à deux degrés, préconisant ce qu'il appelle la

Députation en droiture... Raisons: 1. Assujettissement des députés à la censure de leurs commettans. 2. Avantage de la simplicité.

Il condamne les « tournées» (en anglais : canvassing) :

Dans les élections, il est à désirer que le choix se trouve déterminé chez la foule des électeurs plutôt pour la renommée générale que pour la connoissance particulière.

Et présente encore les observations qui suivent, relatives à l'organisation du suffrage:

Pourquoi recueillir les votes dans la voye secrette par préférence à la voye ouverte?

1. Pour que l'élection soit le résultat des véritables vœux des

électeurs, exempte de toute influence coercitive dénaturante de volonté à volonté.

2. Pour mettre à la place de cette influence séductrice, l'influence d'esprit à esprit dont l'effet est de soumettre la conduite des moins instruits à ceux qui le sont davantage. 3. De mettre en défaut toute espèce de corruption en lui ôtant ses sûretés.

4. Pour prévenir les dissentions et les haines invétérées tant de famille à famille que d'individu à individu dans la même famille, fruits si fréquens des élections contestées sous le régime de la publicité des suffrages.

Pourquoi recueillir les votes séparément par paroisses, au lieu de les recueillir tous ensemble dans le chef-lieu du district?

Raisons.

1. Pour diminuer les frais occasionnés par le déplacement d'un si grand nombre de personnes.

2. Pour diminuer les longueurs.

3. Pour diminuer la fermentation et les rixes.

4. Pour ôter le prétexte que fournit à la corruption le besoin d'alléger aux moins riches les frais de déplacement.

Pourquoi faire recueillir les votes au même tems dans toutes les paroisses?

1. Pour rendre plus difficiles les applications particulières des candidats en personne, et par là faire dépendre le succès des candidats plutôt d'une bonne réputation générale, fruit et preuve du mérite, que de ces applications particulières où les bassesses et l'intrigue ont de l'avantage sur le mérite.

2. Pour prévenir ou au moins défavoriser les intrigues que pourroit amener la connoissance des succès partiels acquis par les suffrages consécutifs des divers districts.

Comment admettre que Bentham eût oublié, lorsqu'il écrivit, en 1809, son « Catéchisme de la Réforme parlementaire », ses tra

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